L’histoire de Rexpoëde
Les origines de Rexpoëde
Rexpoëde est mentionné en 1107 sous les noms de Rexpouda, Rikespold, Rikespoud, du germanique Rikis Bothia (demeure de Riki), chef de clan franc probablement. En 1650, dans sa Flandria Illustrata, Antonius Sanderus dit Rexpoele, lui donnant le sens de Rangée de marais de « Reks » et « Poel », et les cartes ou peintures de châtellenies de Bergues et Furnes disent « Respoue », c’est d’ailleurs ainsi qu’il se prononce couramment en flamand occidental.
Aujourd’hui, et malgré l’apparition du « ë » dans l’orthographe du nom, Rexpoëde se prononce « rexpoude » contrairement à d’autres lieux ou noms flamands comme « Les Moëres » ou encore « Citroën » où la marque du « ë » est prononcée à la française.
Offrant une idée de ce que fut partout cette époque de dissension, de délation et de luttes, Rexpoëde paye son tribut à l’époque révolutionnaire : en 1791, trente hommes et un officier y sont délégués « pour assurer la tranquillité publique et protéger le sieur Colard, capitaine général des douanes, et sa brigade ». En mars 1792, les gendarmes durent intervenir et eurent fort à faire pour réprimer une émeute qui avait éclaté lors de la plantation de l’Arbre de la liberté. En 1793, le curé constitutionnel Vanden Heede, farouche patriote, dénonce et fait arrêter le conseil municipal ainsi que le sieur Verscheure et ses cinq sœurs, tous acheminés sur la prison de Béthune en attendant leur transfert à Arras pour pourvoir la guillotine de Jean Lebon et qui ne doivent leur salut qu’à la chute de Robespierre le IX Thermidor an III (27 juillet 1794).
La bataille d’Hondschoote
En cette même année 1793, le village fut le théâtre de deux combats : le 21 août, pour investir la place forte de Bergues, les Anglo-Hanovriens du maréchal Freytag, après avoir réduit Oost-Cappel, font irruption dans le village où les Sans-Culottes, aidés par le curé Vanden Heede à la tête d’une quinzaine de jeunes gens du village, résistèrent pendant trois heures à un contre dix ; les 6 et 7 septembre suivants, venant de Bambecque, l’armée républicaine, avec des fortunes diverses, occupe le village et, lors d’un engagement d’avant-garde, tint un moment entre ses mains le prince Adolphus, septième fils du roi d’Angleterre, et garda prisonnier, une partie de la nuit, le maréchal Freytag de l’armée hanovrienne, dans la « maison du potier ».
Du XIXe siècle à nos jours
Empruntons, depuis Bergues, l’ex Nationale 16A qui, depuis 1963, est dénuée de ses grands arbres qui lui faisaient si belle parure. Dix kilomètres et voilà Rexpoëde, village important et bien bâti, offrant l’ordonnance continue de ses maisons avenantes, souvent à deux niveaux, s’alignant tout au long de ce qui fut, sous l’Ancien Régime, la chaussée royale de Bergues à Ypres et qui fut longtemps pour Dunkerque la route de Lille (pavée seulement au XVIIe siècle).
Dans la cour de Baudouin, comte de Flandre, sont identifiés trois Rexpoedois qui ont noms Jacquemart, Digue et Lotard.
Dans le contexte de l’industrie drapière qui prédomine à Hondschoote, en 1280, foulons et tisserands rexpoedois se joignent à la révolte contre la mainmise corporative d’Ypres. En 1328, à la bataille de Cassel contre le roi de France, Philippe VI de Valois, les milices flamandes vaincues accusèrent cinquante-six morts de Rexpoëde alors qu’Hondschoote, ville industrielle, en compte cent vingt-huit, ce qui est pour ce village indice d’une certaine concentration humaine.
La gare, sur la ligne Rexpoëde – Bergues-Gare exploitée par la Compagnie des chemins de fer des Flandres
Bien centré, Rexpoëde a toujours fait figure de bourg ; il n’est que d’évoquer ses deux marchés hebdomadaires, le chemin de fer d’intérêt local (à voie métrique, en activité de 1893 à 1957) le reliant tant à Dunkerque qu’à Hazebrouck lui ouvrant les communications sur Lille et, de là, sur Paris.
Ses quatre brasseries, dont deux dataient du XVIIe siècle, sa distillerie, qui naquit vers 1880 et fut très active jusqu’en 1954 où beaucoup fermèrent par dispositions gouvernementales. Une poterie où l’on fabriquait carreaux de terre vernissée, tuiles, tuyaux de drainage et qui était plus que séculaire lorsqu’elle ferma vers 1890 et dont la rue de la poterie nous rappelle l’existence. Émile Coornaert cite aussi une « fabrique » de tabac, mais il y existait encore une briqueterie et une tannerie. Le marché du jeudi devint si important que, en 1894, on décide de l’agrandir de 400 m2 et de paver une partie du cimetière qui devint ainsi la place actuelle.
Contribuant encore à l’animation, s’y tenaient deux neuvaines annuelles, les troisièmes dimanches de juillet et de septembre, dont nous sont restées les ducasses. Le marché aux bestiaux se tenait place Saint-Pierre qui était l’intersection de la rue principale avec celle de la poterie et la rue nouvelle qui était plus dégagée que maintenant. Il se tenait le dimanche matin.
L’actuelle société de Saint Sébastien est l’héritière ou la survivance de celle que, en 1650, Sanderus mentionne comme y existant depuis fort longtemps.
C’est en 1866 que fut fondée la première société de musique qui existe encore actuellement. Sapeurs-pompiers et carabiniers y étaient également présents jusqu’en 2000, et jusqu’en 1950, dans trois bourloires, on pratiquait la boule flamande.
Les armes de Rexpoëde se blasonnent ainsi : « D’argent à la fasce de sable, au premier canton d’or bordé de gueules et chargé d’un lion de sable. »
Ces armoiries sont identiques a celle de la Châtellenie de Bergues avant 1586.
Légendes
Le cimetière du diable
Au lieu-dit Duivels Kerkhof (Cimetière du Diable) on disait « qu’en cet endroit s’élevait un couvent que le courroux céleste fit disparaître en une nuit en punition de la conduite licencieuse des nonnettes et où nul ne s’aventurait la nuit tombée à cause des feux follets qui poursuivaient les humains… ».
Personnalités liées à la commune
– Wenceslas Cobergher, ingénieur des eaux, habitat le château Bouly de Lesdain, qui dessécha Les Moëres de 1619 à 1627 par la création d’une digue de protection des Moëres, le Ringsloot. Il inventa également le drain en terre cuite permettant le drainage des terres humides de la Flandre argileuse.
– Les frères Neuville : Dans la première moitié du XIXe siècle, une famille de facteurs d’orgues d’églises, les Neuville, y fut en grand renom. Le père Charles Louis (1816) et ses deux fils, Emile (1843), Alfred (1847), fournirent, réparèrent ou transformèrent les instruments de la plupart des églises de Flandre et largement au-delà, exportant même en Allemagne et en Amérique. Un troisième fils, Valentin Neuville, fut Premier Prix de Conservatoire de Bruxelles et professeur d’orgue au Conservatoire de Lyon ; c’est un compositeur post-franckiste des plus attachants. Ainsi, la rue qui porte leur nom honore tous ceux qui œuvrent à l’essor et à la réputation du village. Au n° 25, rue des Frères Neuville, se situe la maison qui fut la demeure et l’atelier de fabrication des frères Neuville
– Lamartine qui avait un faible pour Hondschoote fit don à l’église de Rexpoëde d’une cloche, c’était lors d’une campagne électorale… en 1833.
– Le général Anthoine : Une rue porte le nom du général Anthoine. « Durant la Première Guerre mondiale, le général Anthoine, commandant la première armée française, eut, de juin à septembre 1917, son quartier général dans l’actuel GROEN HOF (le domaine vert) où l’on décida d’aligner le front de Dixmude, au nord, avec celui de l’armée anglaise vers Ypres, et par la même occasion de montrer aux alliés américains, fraîchement entrés en guerre à nos côtés, que l’armée française était restée un outil efficace et cohérent entre les mains de ses chefs, après les mutineries du printemps 1917. Pendant toute cette période défila dans cette propriété tout ce que les pays alliés possédaient comme rois, princes, présidents de la République, généraux. ministres et délégations ».
Wilfried Martens : Le restaurant du Lion d’Or reçut l’été 1988 la visite de M. Wilfried Martens, Premier ministre de Belgique.